Objet de plusieurs désaccords au sein de l’industrie meunière camerounaise, les 50 000 tonnes de blé offerts par la Russie à la RCA ont été transformés par la Société des Céréales du Cameroun (SCC), appartenant au Groupe Kadji. Une partie du produit a quitté Douala vendredi à destination de Bangui. A terme, ce sont 20 000 tonnes de farine qui seront réceptionnées par la Centrafrique.
L’alerte lancée par EcoMatin concernant l’affaire du don de blé russe destiné à la République centrafricaine en fin décembre 2023, porte ses fruits. Bangui vient en effet de recevoir une première cargaison de farine issue de la transformation au Cameroun, de ces 50 000 tonnes de céréales gracieusement offertes par la Russie. Une livraison de sacs de 50 et 100 Kg de farine de blé réceptionnée, non pas par le directeur général des Douanes centrafricaines qui a pourtant piloté le dossier dès l’arrivée des navires russes au Port de Douala, mais plutôt le ministre des Travaux publics, par ailleurs ancien ministre de l’Agriculture Eric Rokosso-Kamot.
20 000 tonnes de farine attendues à Bangui
Le blé destiné à la RCA a été transformé par la Société des Céréales du Cameroun (SCC), une minoterie appartenant au groupe du milliardaire camerounais Kadji Defosso, de regrettée mémoire. Ainsi, selon le membre du gouvernement centrafricain, ce sont près de 20 000 tonnes de farine, représentant la consommation annuelle du pays, qui seront acheminées à Bangui au terme du processus. « Nous avons bénéficié de 50 000 tonnes de blé qui sont arrivés au Cameroun en deux cargaisons, a expliqué le ministre aux médias. Après le déchargement, nous avons relevé quelques pertes du fait que c’est un produit périssable. Nous avons en définitive reçu 49 684 tonnes de blé. Et avec le processus de transformation, nous allons atteindre une production définitive de 20 000 tonnes de farine, compte tenu du taux d’extraction qui varie ».
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La farine qui est progressivement acheminée à Bangui est le produit fini d’un geste humanitaire décidé par le Kremlin, qui s’était engagé lors du Sommet Russie-Afrique de juillet 2023, à partager gracieusement 200 000 tonnes de blé entre 6 pays africains, dont la RCA. Problème, la Centrafrique est un pays enclavé qui ne dispose pas d’une industrie meunière locale. Pour pallier cette double difficulté, le pays fait transiter ce don par le Cameroun, via notamment le Port de Douala en décembre. Le directeur général des Douanes centrafricaines sollicite ensuite son homologue camerounais afin de vendre cette cargaison de blé à des meuniers locaux, avec l’engagement de racheter la totalité de la farine issue de sa transformation pour l’expédier en Centrafrique. Une transaction qui a suscité des réactions au sein du Groupement des industries meunières du Cameroun (Gimc) où certaines voix se sont exprimées pour dénoncer un risque de détournement de ce don russe.
La victoire de la diplomatie
La polémique suscitée par les meuniers camerounais et la presse aboutit à l’intervention des chefs d’Etat des deux pays concernés. C’est alors que le Centrafricain Faustin Archange Touadera dépêche sa ministre des Affaires étrangères auprès de son homologue Paul Biya le 18 janvier 2024. Objectif : prévenir tout risque de détournement de la cargaison de blé destiné à la RCA au profit du marché camerounais et garantir l’intégrité des quantités de farine attendues. Un mois et demi plus tard, tout semble s’être déroulé comme prévu. « C’est un ouf de soulagement, s’est réjoui le ministre centrafricain des Travaux publics. Je voudrais remercier […] le président Paul Biya dont l’intervention personnelle a permis l’aboutissement heureux de ce processus ».
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Ecomatin